La petite porte

Je ne comprends plus le monde qui m’entoure
Je suis obligée d’admettre
Que j’ai fait semblant de comprendre
J’ai dit « oui , tout est normal. »
Pour qu’on me laisse tranquille
Mais depuis, plus rien ni personne ne me laisse tranquille
Depuis, plus rien ni personne n’est normal
J’ai perdue toute ma tranquillité
Je ne suis plus étanche.

J’ai perdue ma normalité
Comme un pucelage.
Derrière une petite porte.
Une petite porte dans un mur gris.

J’arrive en courant
J’ai besoin de courir
La fac, les profs, les étudiants,
Je vis dans ce monde là…
Je fréquente ces gens.
Les voitures, le bus, la gueule du conducteur,
Un vélo parfois, il porte un masque.
Les panneaux de pubs, les panneaux de signalisations,
Je vis dans ce monde là…
Je cours a cause d’un sentiment informulable
Je cours dans une catastrophe sans issue.

Ça n’a rien d’agréable
Ça me fait battre le cœur trop vite
Tout va trop vite
Mes tempes vont exploser
Mes poumons brûlent
Je ne suis pas en retard
Je ne suis même pas pressée,
Je cours pour voir tout flou
Et sentir le vent dans mes oreilles.

Toute ma vie, est une course floue
Le long d’un mur :
Il y a le mur de l’école
Avec parfois un graffiti
Le mur de l’usine
En briques rouges
Le mur de la banque
Est surveillé par deux caméras
Le mur de l’hôpital
Recouvert d’affiches…

Je cours maintenant le long de ce mur
C’est le mur du cimetière
Ce mur est gris et flou
Je le connais par cœur
Chaque jour il côtoie mon chemin
J’arrive en courant,
Je repars en courant,
Chaque jour…
Chaque jour ce mur est là
Chaque jour gris
Chaque jour flou
Chaque jour pareil

Sauf aujourd’hui :
Je me suis arrêtée subitement
Je viens de voir une petite porte dans le mur
Que je n’avais jamais vue avant !

Toute ma vie
J’ai courue le long des murs
J’ai vécue dans le gris
Et dans le flou
Mais aujourd’hui je me suis arrêtée de courir
Je viens de briser un sortilège.
J’ai réalisée que je n’avais simplement pas vécue.

Je ne peux plus faire semblant de ne pas avoir le temps :
Je me suis arrêtée !
Je me suis arrêtée devant cette porte rouillée
Et j’ai regardée par la serrure
Avec la sensation de transgresser un interdit.

D’abord je ne voyais rien
Puis je me suis rendue compte
Que mon imagination pouvait me jouer des tours :

Je me suis vue derrière la porte !
Je me suis vue libre et insaisissable !

Il n’y avait peut-être rien derrière la porte…
Ou bien n’y avait-il pas de porte ?
Et j’essayais de regarder au travers d’une serrure imaginaire
De plus en plus certaine que ce mur n’existait pas…

Et je me suis laissée emportée par les tours de mon imagination…
Depuis je suis folle :
J’ai cessée de courir
Je ne crois plus aux murs.

J’ai perdue ma normalité
Comme un pucelage.
Derrière une petite porte.
Une petite porte dans un mur gris.
A peu prés rien

Un jour, tu as senti un trou,
Un manque incommensurable dans la matière.
Ton compte en banque était bien garni
Ton agenda bien rempli
Ton foyer accueillant
Le monde était à toi
Ta vie semblait entière
Il n’y manquait rien

A part peut-être justement RIEN

Il n’y avait plus de place pour le vide
Ton propre vide originel et accompli.

Tu ne laissais RIEN au hasard
Le moindre non-sens pouvait te heurter
Les plaisanteries douteuses de tes chefs ne te faisait plus rire…

Alors, tu as quitté les rangs
Décollé tes étiquettes
Tu a pris la porte
Et tu es sorti de tes gonds

Aujourd'hui tu peux enfin marcher
sereinement vers nul part
Tu sais apprécier ton propre vide
Et tu fait des offrandes au vent

Tu détruis tes rêves en silence.
Et tu attends sereinement
Une fin pour ce monde.

Tu as enfin fini de croire
qu'il n'y a aucune issue
au monde que tu imagines
au monde que tu réalises
Tu sais depuis toujours
Que c'est TOI qui a inventé l'univers
Que c'est TOI qui a fabriqué tout ses pièges
Et que tu es le seul à pouvoir te délivrer

Dés que tu aperçoit une brèche
Tu peux t'y engouffré
Et sortir enfin de ce monde
trop vaste et trop étroit pour TOI.