A propos des

commandos clowns

« (…)Au début, personne ne se doutait de rien. Il y avait juste des gens qui disparaissaient… Et puis quelques phénomènes bizarres, inexplicables…
(…) Ensuite il y a ces désertions massives… De plus en plus de gens ne travaillaient plus, et ils ne remplissaient plus de formulaires administratifs…
(…) On a soupçonné les Commandos Clowns… Mais il n’y a aucune organisation derrière, c’est complètement chaotique ! C’est comme si chaque branche du réseau devenait aussitôt un groupuscule autonome engendrant spontanément un nouveau réseau !
- Attendez là je ne comprends plus…
- Bon nous connaissions les développements en réseau…Depuis longtemps il n’y avait plus de chef,
plus de leader charismatique, ni même de porte-parole… ça on s’y était habitué… Mais la plupart étaient tout de même interdépendants. Il suffisait de casser une branche, d’intercepter une connexion, ou de manipuler un élément influent, pour perturber tout le réseau.(…) Jusqu’ici la guerre psychologique avait fait ses preuves. Mais aujourd’hui absolument n’importe qui peut s’approprier une pensée dissidente et la mettre aussitôt en pratique.
Les gens ne se rattachent plus à des idéologies massives, ils auraient plutôt tendances à suivre leurs intuitions. Du coup leurs actions ne sont souvent plus rationnelles, ni même orientées vers un objectif.
Ils ne sont pas forcément repérables (…)
On a crut d’abord à une nouvelle forme de nihilisme ludique, certains ont supposés que ces mouvements avaient une origine historique liée au dadaïsme ou aux situationnistes, et certainement il y a des liens, mais on est pas plus avancé avec des millions d’individus tous persuadés de pouvoir transformer la réalité… (…)
- Parlez-nous des Commandos Clowns…
- C’est ainsi qu’ont été baptisées certaines formes d’actions dans l’espace public généralement très colorées (mais pas forcément), les protagonistes ont souvent des nez rouges (mais pas toujours) et l’événement semble au départ tout à fait anodin voir divertissant. De loin on dirait quelque chose comme un spectacle de clowns (d’où le nom de ces commandos). Mais attention c’est de l’improvisation totale, et rien ne les arrêtent ! Pour eux tout est possible ! Ils ne connaissent aucuns tabous et la confrontation avec les forces de l’ordre ne leur fait pas peur ! Ils sont totalement imprévisibles ! Ils improvisent leur tactique sur le terrain, ils n’obéissent qu’aux lois de l’instant… Ils proclament la liberté absolue et immédiate pour tous les êtres vivants… Ils prétendent qu’il suffit de vouloir faire tout ce qu’on peut, pour pouvoir faire tout ce qu’on veut ! C’est vraiment le chaos total et alors bien souvent ça tourne à l’émeute…Forcément… (…) Pendant un temps la mode était aux assemblées populaires tout le monde parlait de ses problèmes et ça n’avait pas l’air dangereux. Mais par la suite ils se sont tous mis à agir par eux-mêmes seuls ou en petits groupes sans chef, ni directives.
En soi, les quelques dégâts matériels sont sans importance. Mais maintenant il y a de plus en plus de communautés autonomes et d’apprentis nomades. Tous développent un mode de vie totalement subversif qui sapent les valeurs du travail, de l’argent, de la réussite sociale ou même de l’insertion… (…) Mais le plus inquiétant est qu’ils sont réellement parvenus à penser par eux mêmes. (…)
- Donc d’après vous qu’est ce qui à bien put déclencher ce phénomène ?
- D’après moi - je vais vous dire franchement- c’est un cumul de sortilèges ! »

Interview de Robert M. Gates
Washington Post 21 janvier 2005